Pouvez-vous vous présenter en quelques mots ? Qu’est-ce qui vous a conduit à prendre la présidence de la Chambre ?
Alain Gautron : Je suis notaire à Saint-Malo et exerce depuis 1992 au sein d’EMERAUDE NOTAIRES, avec deux associés. Ayant plus de trente ans de métier, j’ai été témoin de nombreuses évolutions de notre profession.
J’ai déjà occupé plusieurs fonctions institutionnelles : président de la Chambre des notaires d’Ille-et-Vilaine il y a une dizaine d’années, délégué régional de la cour d’appel de Rennes à l’Assemblée de liaison des notaires de France, et rapporteur général sur le thème de la communication.
Ma candidature à la Chambre interdépartementale a été motivée par le contexte de réflexion sur l’organisation de cette instance, encore récente puisqu’elle n’a que deux ans d’existence. Les débats portaient notamment sur l’équilibre entre centralisation et proximité : un fonctionnement trop centralisé risquait d’éloigner le notaire de son instance représentative.
En tant que professionnel attaché au maillage territorial, j’ai défendu une approche décentralisée et participative. Élu représentant de l’Ille-et-Vilaine, j’ai ensuite été choisi par mes pairs pour en assumer la présidence.
Le prochain Congrès des notaires, en septembre, portera sur « Famille et créativité notariale : accompagner les tribus d’aujourd’hui ». Qu’en attendez-vous ?
A. G. : Le Congrès est toujours un rendez-vous important. Cette année, il sera présidé par Jean Gasté, notaire à Nantes, représentant la compagnie de notaires de la Cour d’appel de Rennes. Cela nous motive particulièrement.
Mais c’est avant tout un lieu de réflexion et de débats, où l’on partage les expériences et où l’on enrichit nos pratiques au service des familles, dans toute leur diversité.
Vous avez renforcé le partenariat avec la Fédération des Promoteurs Immobiliers dans le cadre des Pyramides d’Argent. Comment analysez-vous la situation du marché immobilier breton ?
A. G. : Notre rôle est avant tout de sécuriser les transactions et d’accompagner les acteurs du secteur. Depuis plusieurs années, la Chambre travaille avec les FPI Bretagne et Pays de la Loire, ainsi qu’avec l’association OREAL pour produire et diffuser des statistiques fiables sur l’immobilier neuf, complétées par des données sociologiques utiles pour comprendre les causes de la crise actuelle.
Le segment de l’investissement locatif est en difficulté, mais l’accession à la résidence principale se maintient, notamment grâce à des dispositifs comme le Bail Réel Solidaire (BRS) qui rend l’achat plus accessible.
Les notaires ne se contentent plus d’enregistrer les ventes en l’état futur d’achèvement (VEFA) : nous accompagnons les montages juridiques complexes, et les choix à opérer en matière de divisions foncières ou de copropriétés, afin de sécuriser au mieux les projets.
La campagne « Attendre, c’est prendre le risque de se décourager » a marqué les esprits. Pourquoi ce message ?
A. G. : Nous voulions inciter à passer à l’action. Le marché montre quelques signes positifs : les prix ont légèrement baissé et l’offre est plus accessible. L’immobilier reste une valeur refuge.
Cette campagne s’inscrit dans une stratégie de communication régulière : la Chambre publie chaque trimestre les chiffres du marché régional, afin d’informer et de rassurer les particuliers comme les professionnels.
La réforme des apostilles est entrée en vigueur le 1er mai 2025. Quel bilan faites-vous ?
A. G. : À Rennes, la cour d’appel a repris le service public de l’apostille. Nous avons aménagé un espace dédié et recruté deux collaboratrices entièrement dédiée à cette mission. Depuis mai, environ 1 500 dossiers ont été traités.
C’est un service apprécié des usagers, et nous nous préparons déjà aux prochaines étapes de la réforme.
Quelles actions concrètes menez-vous pour sécuriser l’activité notariale ?
A.G. : La réforme des inspections nous oblige à repenser entièrement notre organisation. Les changements de calendrier et les nouvelles obligations ont demandé une grande capacité d’adaptation à nos confrères.
Sur la cybersécurité, nous organisons régulièrement des formations, suivies par 86 % des notaires, et diffusons dans notre newsletter des alertes sur les risques de piratage.
Nous incitons aussi les offices à s’équiper d’outils numériques performants, parfois intégrant l’intelligence artificielle, afin de mieux protéger leurs échanges avec clients et partenaires.
Comment structurez-vous la formation continue ?
A.G. : Nous disposons d’une offre de formation solide, avec un membre du bureau dédié à ce domaine. Nous élargissons les thématiques vers le management, l’international ou l’intelligence artificielle.
La Bretagne étant la première compagnie de France en nombre d’offices, nous devons continuer à professionnaliser nos pratiques. Cela passe aussi par la modernisation de nos commissions internes, afin qu’elles soient plus efficaces et pertinentes.
Un dernier mot ?
A.G. : La création des chambres interdépartementales pose aussi la question de notre identité collective. Nous devons renforcer le sentiment d’appartenance des notaires à l’échelle de la cour d’appel de Rennes et, au-delà, de la Bretagne.
Cela passe par une meilleure communication interne, le développement de nos infrastructures et la multiplication des occasions de rencontre et de coopération entre confrères.
Propos recueillis par Christian-Olivier Kajabika
Rédaction du Village des Notaires et du Patrimoine