Pouvez-vous vous présenter en quelques mots ? Qu’est-ce qui vous a conduit à prendre la direction de la Chambre ?
Jean-Charles Rault : Depuis mon adolescence, j’ai toujours voulu devenir notaire, même si je ne viens pas d’une famille de notaires. Très tôt, ce choix s’est imposé à moi et j’ai suivi le parcours jusqu’à l’obtention de mon diplôme. Aujourd’hui, je suis associé et j’ai toujours exercé mon métier avec rigueur, neutralité et un respect strict des règles de droit.
La présidence de la Chambre s’inscrit dans la continuité de ce parcours. Beaucoup de confrères m’ont encouragé à me présenter. J’ai donc accepté cette responsabilité avec la volonté de servir l’intérêt général de la profession et de poursuivre ce cheminement naturel.
Quel regard portez-vous sur le prochain Congrès des notaires et sur son importance pour la profession ?
J-C. R. : Le Congrès des notaires est un rendez-vous essentiel. J’y ai déjà participé à plusieurs reprises et j’en rappelle toujours l’importance aux jeunes confrères, comme tout récemment à deux futurs notaires qui s’apprêtent à prêter serment. Les thèmes abordés sont souvent précurseurs : ils annoncent les évolutions législatives et offrent une vision prospective de notre métier.
Cette année, le sujet de la famille et des « tribus » résonne particulièrement avec nos réalités. En Normandie, nous sommes attachés à ce rendez-vous, d’autant plus que le Congrès s’était tenu à Deauville il y a deux ans, pour la première fois depuis vingt ans. Chaque année, une trentaine de notaires de notre compagnie y participent.
La dernière note de conjoncture immobilière du Conseil supérieur du notariat fait état d’une reprise modeste des transactions. Observez-vous la même tendance dans le Calvados, la Manche et l’Orne ?
J-C. R. : Effectivement, après la crise de 2023-2024, la Normandie reste relativement privilégiée. Dans le Calvados, l’attractivité demeure forte, à Caen comme sur la côte, notamment à Deauville où l’on observe un nombre important de mutations.
Dans la Manche, certains secteurs littoraux comme ceux de Barneville-Carteret ou Jullouville connaissent une demande soutenue, ce qui tire les prix à la hausse. L’Orne, plus rural, présente une dynamique différente, mais l’activité reste correcte. Globalement, les chiffres de la compagnie confirment les projections nationales : l’année 2024 s’est terminée sur un niveau d’activité satisfaisant, et 2025 se maintient dans la même tendance.
Votre ressort n’est pas concerné par la réforme de l’apostille entrée en vigueur le 1er mai 2025. Comment gérez-vous cette situation ?
J-C. R. : Effectivement, notre cour d’appel ne figure pas parmi les 15 juridictions concernées. Nous sommes en relation avec les chambres voisines, notamment de Rouen, Angers et Rennes qui sont chargées de cette mission. Nous tenons régulièrement informés les notaires de notre compagnie par le biais de notre fil d’informations hebdomadaire et lors de nos assemblées générales.
C’est une réforme récente, sur laquelle nous n’avons pas encore beaucoup de retours concrets, mais l’essentiel est que l’information circule bien et que nos usagers soient accompagnés efficacement.
Depuis le 1er juillet 2025, le bail notarié bénéficie d’une force exécutoire. En quoi est-ce une avancée ?
J-C. R. : C’est une évolution très importante. Nous avons communiqué activement sur ce sujet, notamment via nos réseaux sociaux. Le bail notarié, en tant qu’acte authentique, renforce la sécurité des propriétaires bailleurs : il leur permet de récupérer plus rapidement leur bien en cas d’impayés, grâce à sa force exécutoire.
Cela redonne confiance aux propriétaires qui hésitaient à louer, par crainte de risques financiers, et cela favorise aussi l’accès au logement pour des publics comme les étudiants ou les jeunes actifs. C’est, à mon sens, une manière de redonner toutes ses lettres de noblesse au bail notarié.
La Chambre de Caen est très active en matière de communication et d’événements. Pourquoi cet engagement ?
J-C. R. : Nous voulons montrer que les notaires ne se résument pas à la signature d’actes. Notre mission est aussi d’être présents dans la vie de nos concitoyens et de leur expliquer notre rôle. Beaucoup ignorent encore l’étendue de nos compétences.
Nos réseaux sociaux, notre podcast à succès « Histoires vraies : les notaires vous racontent », notre escape game « Dernières volontés » sont autant d’outils précieux pour valoriser cette présence et la Chambre de Caen a toujours cherché à être en avance, tout en respectant les règles fixées par l’État et le Conseil supérieur du notariat. Nous sommes des notaires de notre temps.
Souhaitez-vous évoquer un sujet qui vous tient particulièrement à cœur ?
J-C. R. : La Chambre s’est emparée du sujet de l’IA et développe actuellement un chatbot intitulé« MarIAnne » pour l’aider à apporter des réponses qualifiées aux notaires. Cet outil s’inscrit en complément du progiciel d’instance « Room Service » que nous avons cocréée avec une SSII.
Nous venons de lancer un club de management animée par un professionnel afin d’encourager les notaires à développer leurs « soft skills » Les sessions mensuelles sont accessibles en présentiel ou en distanciel, avec replay, pour s’adapter à la contrainte des agendas.
Notre chambre entretient également depuis vingt ans un jumelage fidèle avec les notaires du Togo, et je conduirai à l’automne une délégation d’une trentaine de confrères pour célébrer cet anniversaire.
Enfin, en octobre, nous organiserons la deuxième édition de la Notariat Académie. Pendant une journée, l’ensemble 2 000 notaires et collaborateurs de la compagnie seront réunis à Caen, sur le campus de l’Université pour une quarantaine de sessions de formations adaptées à la diversité des métiers de l’office. Cette année, l’accent sera mis notamment sur l’intelligence artificielle. Cette journée sera aussi l’occasion de célébrer nos collaborateurs de longue date, à l’occasion d’une cérémonie de remise des médailles du travail.
Propos recueillis par Christian-Olivier Kajabika
Rédaction du Village des Notaires et du Patrimoine