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Écoblanchiment : la traque aux (fausses) allégations vertes est lancée !

Écoblanchiment : la traque aux (fausses) allégations vertes est lancée !

Avec la prise de conscience écologique croissante, la lutte contre le greenwashing [1] est devenue un sujet de préoccupation institutionnelle. En témoigne, l’enquête réalisée au printemps 2023 par la DGCCRF [2] sur le secteur des produits non-alimentaires et des services. Le service de Répression de fraudes dresse un bilan mitigé : malgré le cadre juridique pour réguler l’écoblanchiment, les manquements sont encore nombreux.

Les consommateurs sont de plus en plus nombreux à faire le choix d’une consommation plus responsable : près de 3 Français sur 4 affirment changer leurs pratiques au quotidien pour réduire l’impact de leur consommation [3]. Une proportion similaire demande une meilleure information sur l’impact environnemental et social des produits et services mis à leur disposition [4] .

De quoi pousser les entreprises à communiquer davantage sur les propriétés de durabilité, de responsabilité et de respect de l’environnement des produits ou services qu’ils commercialisent. La tentation peut alors être forte pour certains professionnels, d’embellir certaines caractéristiques de leurs produits, une pratique qui porte un nom : l’écoblanchiment

L’écoblanchiment, ou « greenwashing », consiste en effet à utiliser des allégations environnementales et écologiques totalement ou partiellement fausses - ou encore non vérifiées -afin de promouvoir un produit. Elles donnent ainsi l’image qu’un bien ou un service affecte positivement l’environnement ou n’a pas d’incidence sur celui-ci, tandis que la réalité est toute autre.
Pour reprendre la formation de l’Agence de l’environnement et de la maîtrise de l’énergie (ADEME), il s’agit de « verdir » ou de donner une image écologique à des entreprises et à des produits qui ne le sont pas. Une forme de publicité (un peu, voire beaucoup) mensongère en quelque sorte [5], pour attirer les consommateurs et augmenter les ventes. De quoi faire intervenir nos législateurs et régulateurs français et européens.

Écoblanchiment : le cadre juridique en France et en Europe

La communication verte est une pratique fréquente. Afin mieux maîtriser et encadrer les pratiques d’écoblanchiment et ses effets, un cadre juridique contraignant été mis en place depuis quelques années. Il ne cesse, depuis, d’être renforcé, en droit interne et en droit européen

Lutte contre le greenwashing en droit français

En France, la lutte contre le greenwashing a longtemps reposé sur l’applicabilité du droit des pratiques trompeuses, avant d’être étoffé. Parmi les textes qui encadrent l’écoblanchiment, citons notamment :

À ces textes législatifs viennent également s’ajouter les recommandations durables de l’Autorité de Régulation Professionnelle de la Publicité (ARPP) sur l’utilisation d’arguments écologiques dans les publicités.

Au niveau jurisprudentiel, les dossiers sont encore peu nombreux. Deux affaires emblématiques méritent d’être citées :

  • la condamnation de la société Monsanto pour des allégations vertes autour du glyphosate que contient son produit le RoundUp [8].
  • la condamnation de la société General Motors pour une campagne de publicité pour un véhicule hybride [9].

Lutte contre le greenwashing et réglementation européenne

La Commission européenne s’est également saisie du sujet de l’écoblanchiment ettravaillé à la mise en place d’un cadre juridique européen (qui faisait défaut jusqu’à présent). Le but : encadrer les allégations environnementales et garantir au consommateur une information qui lui permette de faire des choix éclairés.

C’est désormais chose faite avec la Proposition de directive adoptée le 11 mai 2023 [10], qui vient ajouter des règles spécifiques aux « allégations environnementales explicites » afin d’assurer la véracité de ces dernières.

C’est dans ce contexte juridico-environnemental que la Direction Générale de la Concurrence, de la Consommation et de la Répression des Fraudes (DGCCRF)a lancé, pour la première fois en 2021 et 2022, une grande enquête sur l’écoblanchiment des produits non-alimentaires et des services.

Constats d’écoblanchiment : des anomalies encore nombreuses

L’enquête de la DGCCRF montre que sur l’ensemble des entreprises contrôlées, 25% d’entre-elles, ne respectaient pas les règles en vigueur. La raison : elles mettaient en avant des « allégations environnementales » pouvant fausser l’avis des consommateurs sur le produit. Parmi les allégations constatées, la direction en distingue quatre en particulier.

1. Les allégations environnementales globalisantes, qui ont été en majorité relevées par les services d’enquêtes de la DGCCRF.
Il s’agit notamment d’affirmations vagues et non précises sur les bienfaits environnementaux des produits, sans que ceux-ci ne puissent être justifiés par l’entreprise.
Pour la DGCCRF, ces allégations « ne renvoyaient pas à un impact environnemental particulier mais suggérait plutôt un bénéfice global pour l’environnement : par exemple "respectueux de l’environnement", "écologique" ou "éco- responsable" ».
En l’absence de preuves pour justifier ces allégations, elles sont considérées comme trompeuses pour les consommateurs.

2. Les allégations environnementales non justifiées. L’étude montre que certaines entreprises utilisent fréquemment des informations flatteuses non justifiées dans le seul but de se démarquer leurs concurrents.

3. Les allégations environnementales imprécises ou ambiguës. La DGCCRF a noté l’utilisation par certaines entreprises de nombreuses affirmations environnementales dont l’imprécision ou l’ambiguïté pouvait amener le consommateur à se faire une fausse idée sur l’impact écologique réel du produit. Elle donne notamment comme exemple un produit pour lequel il est indiqué que 100% de la matière est recyclée, alors que dans les faits, le recyclage ne concerne qu’une partie du produit.

4. Les allégations environnementales contraires à la législation. Fait encore plus grave, l’enquête révèle que parmi les allégations relevées, beaucoup sont contraires aux dispositions légales.
Certaines entreprises invoquent en effet les bienfaits environnementaux de produits biocides ou des cosmétiques (en apposant par exemple des logos verts), alors que les réglementations interne et européenne pose une interdiction de principe à l’égard de ces mentions pour ces produits chimiques.

Quelles suites à apporter aux anomalies constatées ?

À l’issue des contrôles qu’elle opère et en vertu de ses pouvoirs de sanction administrative, la DGCCRF peut apporter des réponses d’ordre pédagogique, correctif ou répressif des manquements constatés [11].

Au total, la DGCCRF révèle avoir dressé :

  • 141 avertissements ;
  • 114 injonctions ;
  • 18 procès-verbaux pénaux ou administratifs pour les pratiques d’écoblanchiment les plus graves.

Relevons toutefois que les entreprises contrôlées se sont, dans une grande majorité, conformées à la législation, en modifiant ou supprimant les allégations trompeuses relevées par la DGCCRF. Mais des progrès restent donc encore à faire pour lutter contre l’écoblanchiment, la conformité avec la réglementation en matière d’allégations environnementales n’allant pas encore de soi.
Mais que chacun se le tienne pour dit : la DGCCRF compte accroître ce type de contrôle en 2023 ! Et, en attendant, c’est au consommateur d’apprendre à faire le tri dans les communications et autres publicités, pour éviter de tomber dans les pièges des outils de communication et de marketing bien trop borderline de certaines entreprises peu scrupuleuses !


Notes :

[1écoblanchiment

[2Direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes

[3GreenFlex/ADEME, oct. 2022, Baromètre de la consommation responsable.

[5Les articles 4 et 10 de la loi reconnaissent officiellement le greenwashing comme « une pratique commerciale trompeuse » interdite et sanctionnée dans l’article.L132-2 du code de la consommation

[6l’information des consommateurs sur les qualités et caractéristiques environnementales des produits (C. env., art. L. 541-1-9) et l’information sur les primes et pénalités sur l’éco-contribution versées par le producteur au titre de la gestion de la fin de vie de leurs produits (C. Env., art. L. 541-9-1)

[8CA Lyon, Oct. 29, 2008, n° 12/00007 ; Cass. crim., 6 oct. 2009, n° 08-87.757 : ces allégations ont été jugées comme constitutives de pratiques commerciales trompeuses

[10Modifiant les directives 2005/29/CE du 11 mai 2005 sur les pratiques commerciales déloyales et 2011/83/UE du 26 octobre 2011 relative aux droits des consommateurs

[11Sur les pouvoirs d’enquête et de sanction de la DGCCRF, voir not. min. Économie, Les contrôles de la DGCCRF. Pouvoirs d’enquête et de sanction

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