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[118e Congrès des Notaires - Immobilier] « Il ne s'agit pas d'une guerre ouverte contre les professionnels de l'immobilier »

[118e Congrès des Notaires - Immobilier] « Il ne s’agit pas d’une guerre ouverte contre les professionnels de l’immobilier »

La 1re Commission (immobilier) du 118e Congrès des Notaires de France propose de modifier plusieurs dispositions du Code civil et du Code de la construction et de l’habitation. Il s’agirait d’adopter une définition légale de l’acheteur et du vendeur professionnel et de solenniser le contrat de vente d’immeuble. Nous avons voulu en savoir plus. Me Alexandre Thurel, notaire et Rapporteur général du Congrès, se prête au jeu de nos « questions qui piquent ».

Les propositions du Congrès en matière d’immobilier s’intéressent notamment à la définition du professionnel de l’immobilier et à la vente solennelle.
L’enjeu est celui de la régulation... Pourrait-on y voir une déclaration de guerre contre les (autres) professionnels de l’immobilier
 ?

Alexandre Thurel : Je m’attendais à votre question ! Il ne s’agit bien entendu pas d’une guerre ouverte contre les agents immobiliers et les professionnels qui reçoivent des avant-contrats.
Ces propositions vont dans l’intérêt commun de nos concitoyens.
Aujourd’hui, la majorité de nos concitoyens ignore qu’une vente est parfaite à partir du moment où il y a eu accord sur la chose et sur le prix, par un simple échange de consentement donc, et non à la signature du "compromis" de vente. Elles n’ont pas conscience de s’engager dès cet accord chose-prix. Et c’est vraiment très problématique lorsque l’on corrèle cette ignorance avec la dématérialisation des processus de vente.

« Le but de nos propositions est de limiter le risque contentieux, qui connaît aujourd’hui une croissance importance. »

Un vendeur peut répondre positivement à une proposition qui lui a été faite, alors même qu’il ne sait pas quelle est la qualité de l’acquéreur. On peut alors être contraint de renégocier au moment de la signature de l’avant-contrat, en raison de la découverte d’une condition suspensive (ou de son absence). On comprend qu’il ne soit soudainement plus d’accord pour vendre au premier acheteur. Mais il ne comprend pas lorsqu’on lui oppose le fait qu’en ayant dit « oui » par SMS, il s’est définitivement engagé...

Le but de nos propositions est donc de limiter le risque contentieux, qui connaît aujourd’hui une croissance importance. Même si cela ne se retrouve pas forcément dans les chiffres du ministère de la Justice, car les différends ne se règlent pas tous devant le tribunal, je ne connais pas un notaire qui, notamment pendant la période post-Covid, ne se soit retrouvé confronté à une surenchère sur un bien, pour lequel les vendeurs croyaient s’être simplement échangé des mails ou des SMS, et n’avaient pas conscience que, dans les faits, la vente était parfaite.

Cela concerne donc particulièrement les ventes sous seing privé entre particuliers ?

A. T. : Oui, mais pas seulement. Aujourd’hui, l’avant-contrat est le cœur du réacteur. Il a progressivement, au fil des réformes, été positionné comme le document le plus essentiel : l’avant-contrat est nul si la loi Carrez n’est pas citée, c’est lui qui ouvre un délai de rétractation de l’acquéreur, etc... Et donc, finalement, c’est là que l’intervention du notaire et du sachant est essentielle. Non pas que les agents immobiliers ne soient pas sachants, mais la vente n’est que la réitération des consentements.

« Il faut désormais faire en sorte que l’avant-contrat soit sécurisé. »

Nous avons tous plus ou moins rencontré un problème de ce type, avec des opérations entre particuliers mais aussi entre professionnels. Où est-ce que s’arrêtent les pourparlers ? Où commence le compromis de vente ou la promesse de vente ? À force de travail, cela nous a ouvert les yeux sur une situation complètement ubuesque : on vient de dire qu’il y avait accord sur la chose et sur le prix par le simple échange des consentements ; or lorsque les personnes arrivent en agence immobilière et/ou chez le notaire pour signer l’avant-contrat, on leur explique que l’acquéreur, finalement, n’est pas véritablement engagé parce qu’il a une faculté de rétractation...

D’un point de vue pratique, on signe aujourd’hui des promesses unilatérales de vente. Cela veut donc dire qu’alors même que la vente est parfaite par le simple échange des consentements par mail, on refait un acte d’avant-contrat dans nos études et on explique que, finalement, c’est une promesse de vente, c’est-à-dire que seul le vendeur s’engage et l’acquéreur, lui, outre sa faculté de se rétracter lorsqu’il s’agit d’un bien à usage d’habitation, n’est finalement pas engagé puisque tant qu’il n’a pas levé l’option, il ne doit qu’une indemnité d’immobilisation. La vente n’est donc pas parfaite puisque, par définition, il peut encore se retirer...

Ce n’est pas très clair pour les acheteurs et les vendeurs, et l’on comprend bien pourquoi ! Il faut désormais faire en sorte que l’avant-contrat soit sécurisé.

En somme, vous déplacez le curseur de la sécurité juridique sur l’avant-contrat ?

A. T. : On le déplace uniquement à l’avant-contrat. Cela étant, les détracteurs nous diront certainement que cela vise à attirer de nouveaux clients dans nos études... mais j’anticipe peut-être votre "question qui pique"... !
Une telle conception serait inexacte, puisque la vente allait de toute manière se dérouler chez le notaire. Techniquement, le notaire est donc toujours rémunéré conformément au tarif applicable pour une vente, et pour ce même tarif, il s’occupe à la fois de l’avant-contrat et de la vente.

« La proposition n’empiète pas sur les autres professions. »

En revanche, on peut entendre que l’on renforce la position du notariat sur la vente immobilière et cela me paraît légitime. Aujourd’hui, en l’état actuel de la législation, nous sommes les seuls à faire des actes de vente immobilière. Quant aux avocats qui interviennent dans les grandes ventes, sur des grands complexes parisiens ou des opérations d’envergure, cela ne changera strictement rien à leur position. Actuellement, ils ne signent pas l’avant-contrat, qui reste signé chez le notaire. La proposition n’empiète donc pas sur les autres professions du droit.

Quant aux agents immobiliers, ce n’est pas une déclaration de guerre, bien au contraire. Les pratiques sont certes variables d’une région à une autre mais, à Lyon, par exemple, je vous certifie qu’il n’y a plus un seul avant-contrat signé en agence immobilière depuis plus d’une quinzaine d’années. Les agents immobiliers à Lyon ne signent pas de compromis de vente, ils ont compris - intelligemment et à juste titre ! - que leur mission et leur métier, et ce n’est pas péjoratif, c’est de vendre, c’est-à-dire présenter le bien à la vente et le commercialiser.

Notre métier est d’assurer la sécurité juridique de la transaction, de faire en sorte qu’un vendeur touche le prix dans de bonnes conditions et qu’un acquéreur se voit délivrer le bien tel qu’il lui a été promis, sans qu’un contentieux naisse de cette opération. Ce sont deux métiers complètement différents.

La définition du professionnel de l’immobilier et la solennisation du contrat de vente d’immeuble ont respectivement été adoptées à 95,3 % et 90,9 %. La Rédaction vous fait part de quelques réactions aux propositions lors des débats ainsi que de tous les résultats des votes ici.

Propos recueillis par A. Dorange

Retrouvez le détail des propositions évoquées en cliquant sur les images ci-dessous :

L’intégralité des propositions du 118e Congrès des Notaire de France sont accessibles ici.

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