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Bon débarras et partage successoral réussi
Parution : mardi 13 septembre 2011
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L’un des moments les plus délicats dans une succession est celui où l’on doit se défaire des mille et unes choses ayant peuplé les lieux et les souvenirs. Moment délicat à plus d’un titre. Sentimental d’abord car les objets familiers incarnent alors tous les souvenirs d’une vie disparue. Mais c’est aussi, trop souvent, le moment où les failles dans les familles se révèlent ou s’élargissent. C’est là que se déclenchent les fameuses batailles autour d’une petite cuillère ou d’un service à thé. Le notaire doit montrer à cette occasion tout son savoir-faire psychologique et, autant que faire se peut, jouer pleinement son rôle de conseiller des familles. La meilleure garantie de justesse et d’équité dans l’établissement d’un partage repose sur l’établissement sérieux d’un inventaire. Établi par le notaire, le plus souvent assisté d’un commissaire-priseur judiciaire, l’acte aura toute sa force aussi bien devant les héritiers que face à l’administration fiscale.

Dans l’hypothèse où toute difficulté de partage aura été écartée, il s’agit pour chaque héritier de disposer des biens et objets qui lui reviennent. Bien souvent voisinent dans une maison, au fond des placards, des objets sans aucune valeur et d’autres, qui peuvent trouver preneur. Pour vider intégralement une maison en s’adressant à une société spécialisée, sans engager de frais importants, il sera conseillé de laisser parmi les objets à enlever un certain nombre de choses qui pourront se revendre en brocante et qui permettront à la société de débarras de se rémunérer. Cela fera l’objet d’un accord avec l’entreprise concernée. Dans l’hypothèse où il s’avère nécessaire de payer pour une opération de débarras, il est indispensable de demander un ou plusieurs devis préalables. Quand la maison est vide, chacun est censé avoir pris possession des objets que le partage lui a attribués et être libre d’en disposer à sa guise. Si, au bout de quelques années, l’attachement à l’objet s’estompant, la vente est envisagée, c’est vers une société de ventes volontaires que le détenteur pourra s’orienter s’il désire passer par les enchères publiques pour la réalisation de son bien. Celle-ci ne joue pas le même rôle que le commissaire-priseur judiciaire. Celui-ci est seul compétent pour organiser et réaliser les ventes de meubles aux enchères publiques prescrites par la loi ou par décision de justice, ainsi que les « prisées », estimations correspondantes.

Le commissaire-priseur judiciaire est un officier ministériel nommé par arrêté du garde des Sceaux, Ministre de la Justice. Son domaine d’intervention est vaste, allant des procédures collectives (redressement et liquidation judiciaires), aux saisies-ventes, successions, tutelles, crédits municipaux, etc. Les commissaires-priseurs judiciaires sont un peu moins de 450 en France.

Les ventes volontaires de meubles aux enchères publiques sont désormais organisées et réalisées par des sociétés commerciales : les sociétés de ventes volontaires. Elles doivent être agréées par le Conseil des ventes, autorité de régulation chargée d’agréer les sociétés de ventes et les experts, d’enregistrer les déclarations des ressortissants des États et de sanctionner les manquements aux lois, règlements et obligations professionnelles. Les commissaires-priseurs judiciaires, ou œuvrant dans le cadre des sociétés de ventes volontaires, sont des professionnels dont les compétences sont solides en droit, en histoire de l’art et dans tout domaine dans lequel ils peuvent être conduits à intervenir.

Pour vendre un bien aux enchères, il suffit de prendre contact avec un commissaire-priseur. Vous avez la liberté de le choisir comme vous le souhaitez : en fonction de sa localité, de sa spécialité, des ventes programmées, etc.
Après avoir vu l’objet, le commissaire-priseur vous donnera une première estimation, le plus souvent gratuite, et vous conseillera sur l’opportunité de le mettre en vente, en fonction de vos besoins et de l’état du marché. Vous pouvez également fixer un prix de réserve, c’est-à-dire un prix minimum en dessous duquel l’objet ne peut être adjugé. Dans l’hypothèse où l’objet que vous mettez en vente a fait l’objet d’une estimation par un commissaire-priseur judiciaire dans le cadre d’une succession, celle-ci vous sera bien sûr utile dans votre prise de décision. Ce sera une information qui vous permettra de voir l’évolution éventuelle du marché depuis l’estimation et de décider en toute connaissance de cause, avec l’avis du commissaire-priseur. L’estimation fixée, l’objet authentifié, le type de vente défini, vous devez remplir une réquisition de vente. Cette dernière est un contrat de mandat par lequel vous autorisez la maison de ventes à vendre pour votre compte un ou plusieurs biens vous appartenant. La réquisition de vente doit comporter votre identité, la description des objets que vous donnez à vendre, la date, le lieu de vente et le prix de réserve s’ils sont fixés. Elle indique aussi les frais de vente. Ceux-ci sont libres et parfois négociables. Ils comprennent la rémunération du service rendu par la société de vente et de certaines dépenses engagées à l’occasion de la vente : catalogue, publicité, honoraires d’expert, frais de transport et de magasinage, etc. Après la vente, et si l’objet a trouvé preneur, la société de ventes vous adressera, par courrier, généralement dans un délai d’un mois, votre règlement correspondant au prix d’adjudication moins les frais. Si l’objet n’a pas trouvé d’acquéreur, la société de ventes pourra le présenter dans une autre vente ou vous le restituer.

Depuis quelques années sont apparus des sites de vente aux enchères sur Internet. Le flou juridique qui entoure ces activités est en train de disparaître grâce à l’arrivée de textes d’encadrement qui tendent à offrir un minimum de garanties aux acheteurs et aux vendeurs. Toutefois, si vendre ou acheter une bouilloire usagée ou un canapé d’occasion sur Internet présente un risque limité, pour les objets d’art ou les meubles de valeur, les garanties offertes par les commissaires-priseurs restent inégalées pour le moment. De la préparation de la vente à la surveillance des enlèvements de vos matériels, en passant par la vérification du paiement des acheteurs, le commissaire-priseur prend en charge l’ensemble du processus de vente.
La vente aux enchères publiques dirigée par un commissaire-priseur vous offre garantie, transparence, rapidité et efficacité. Le prix est connu de tous et indiscutable. En effet, la profession est très largement encadrée et règlementée. Les sociétés de ventes volontaires et les experts qui travaillent en collaboration avec eux engagent leur responsabilité civile professionnelle sur l’authenticité des biens mis en vente. Cette responsabilité est couverte par une assurance responsabilité civile professionnelle obligatoire. L’acheteur quant à lui ne prend aucun risque sur la nature des biens achetés, dont l’authenticité et l’état sont garantis pour une période de dix ans. Le vendeur bénéficie de la garantie de paiement du commissaire-priseur. Les sociétés de ventes doivent justifier d’une assurance ou d’un cautionnement garantissant le versement au vendeur du produit de la vente.
Le commissaire-priseur vous assure sa confidentialité, que ce soit en qualité de vendeur ou d’acheteur, ce qui n’est pas négligeable. Les enchères sont libres, vous n’avez pas besoin de vous inscrire ou d’être identifié tant que vous n’achetez pas un bien.

Ainsi, dans sa dimension très matérielle, très concrète, de la dispersion des objets, une succession réussie est une histoire à étapes qui fait intervenir plusieurs acteurs aux compétences nécessaires : le notaire d’abord, organisateur des moments difficiles, le commissaire-priseur judiciaire éventuellement, l’entreprise de débarras ou la société de vente volontaire.
C’est à travers ces professionnels que voyagent les objets, avec leur poids de souvenirs, vers d’autres destins… « Objets inanimés, avez-vous donc une âme / qui s’attache à notre âme et la force d’aimer ? » (A. de Lamartine, « Milly ou la terre natale »).

ALP

Cet article a été publié dans le Journal du Village des Notaires n°22.